Orienter le foncier public vers l'agriculture biologique lors du départ en retraite d'un fermier, l'exemple d'Englefontaine (59)
Le départ à la retraite d'un agriculteur cultivant des terres communales constitue une opportunité pour la municipalité de développer un projet agricole qu'elle juge vertueux.
Situation
L'Avesnois est une région bocagère où prédomine l'élevage bovin. L'accès au foncier agricole y est particulièrement compliqué en raison du manque d'information sur les cessions et de la pratique récurrente du pas-de-porte (transaction financière entre l'exploitant cédant et le repreneur), le mode de faire-valoir majoritaire étant le fermage.
L'installation et la confortation de jeunes agriculteurs, notamment en agriculture biologique (AB) sont des enjeux clés sur ce territoire, notamment pour préserver la ressource en eau.
Septembre 2020 : Un cédant installé sur des terres communales rencontre la mairie pour lui proposer de nouveaux preneurs
Fin 2020 : La commune refuse la répartition proposée par le cédant. Une convention est signée entre le PNR Avesnois, la commune et TDL pour accompagner la commune grâce à un financement de l'agence de l'eau Artois Picardie
Janvier 2021 : La commune réunit le cédant, les 4 agriculteurs intéressés par les terres, la Safer et des associations agricoles, dont Terre de Liens, pour discuter de la redistribution des terres sur lesquelles était installé le cédant
Février 2021 : Les agriculteurs s'accordent sur une proposition qui correspond aux exigences initiales de la commune
Fin 2021 : Le cédant part à la retraite et les nouveaux baux sont signés
Le départ en retraite d'un agriculteur constitue une opportunité pour la jeune équipe municipale d'Englefontaine de s'interroger sur le devenir des terres communales.
La commune est propriétaire depuis plusieurs années d'un corps de ferme, de bâtiments agricoles et d'une trentaine d'hectares. L'ensemble est loué à un agriculteur qui y cultive des céréales en agriculture conventionnelle. Ce dernier, proche de la retraite, commence à organiser la transmission de ses terres à 4 agriculteurs voisins et à discuter du pas-de-porte, pratique récurrente dans cette région, perçue comme un retour sur investissement et une forme de compensation des faibles retraites agricoles.
En 2020, il contacte la mairie et propose de nouveaux preneurs pour ses baux. L'équipe municipale nouvellement élue s'interroge sur ses droits dans la sélection du nouveau preneur et sollicite Terre de Liens.
En fin d'année 2020, la commune refuse l'attribution des parcelles prévue par le cédant. En effet, elle aimerait saisir l'opportunité de ce départ à la retraite pour réfléchir au devenir de ces terres et à un projet agricole cohérent : développer l'agriculture biologique, faire de l'agriculteur locataire un partenaire de la mairie, promouvoir les circuits courts, etc.
En parallèle, consciente de la problématique des faibles retraites agricoles, la commune souhaite imaginer une solution financière pour le cédant qui ne touchera certainement pas les montants de pas-de-porte espérés.
Dans ce contexte, le cédant accepte de décaler son départ à la retraite d'un an, laissant alors le temps de la concertation entre les différentes parties (agriculteurs, élus, cédant) pour définir les repreneurs.
Un travail de concertation avec les agriculteurs locaux pour l'attribution des parcelles
Début 2021, la commune réunit le cédant, les 4 agriculteurs intéressés par les terres, un technicien du Parc naturel régional de l'Avesnois ainsi que des associations paysannes et agricoles (Bio en Hauts-de-France, Initiatives Paysannes, Terre de Liens) pour réfléchir collectivement à l'usage de ces terres et à leur distribution entre les repreneurs. Parmi les quatre agriculteurs intéressés par les terres, l'un est un jeune éleveur bio. Aucune solution de partage des terres, cohérente avec le projet agricole porté par la commune, ne se dessine à la fin de la réunion.
Quelques semaines plus tard, les intéressés reviennent avec une proposition de répartition laissant 70 % de la surface au jeune éleveur bio. Deux hectares sont aussi mis à disposition temporairement d'un des agriculteurs via un commodat afin qu'un maraîcher puisse s'y installer lorsque l'occasion se présentera. Enfin, une parcelle sur laquelle est implantée une éolienne est laissée au cédant afin de compléter sa retraite. La commune accepte cette répartition et Terre de Liens accompagne la mairie dans la rédaction du Bail Rural Environnemental pour l'agriculteur Bio.
- La conversion de plus de 20 ha en bio
- La confortation d'un jeune éleveur bio
- Une retraite agricole confortée
- La prise en main par une commune de son foncier public
- Un dialogue fructueux entre les agriculteurs et la commune
- Volonté de la commune de se ressaisir de son foncier
- Discussion entre les 4 agriculteurs pour proposer un scénario qui conviendrait à la commune
- Le cédant accepte de reculer la date de son départ à la retraite d'un an le temps de trouver un arrangement pour la répartition de ses parcelles.
Prendre en considération les enjeux individuels rencontrés par chacune des parties afin de ne pas attiser des tensions déjà présentes entre agriculteurs.
Installation d'un maraicher sur la parcelle restante de 2 ha afin d'approvisionner la ville en fruits et légumes locaux